Fin mars, le discours sonnait comme un avertissement. Hier,
à 10 h 30, les salariés de l'imprimerie Decoster placée en liquidation
judiciaire ont durci le ton, mis leur menace à exécution et séquestré leur
patron, Jean-Daniel Decoster, dans les locaux de Sequedin, près de Lille.
« On l'empêche de sortir des bureaux pour qu'il réponde à des
questions sur la politique commerciale de l'entreprise, sur la volonté de la
redresser et sur une éventuelle faillite organisée », nuance Frédéric
Deregnaucourt, délégué syndical FO. Le deal paraît simple : la liberté et
l'arrêt du blocage contre les primes extra-légales réclamées par les 79
salariés licenciés.
Car depuis lundi, une quarantaine d'employés se relaient
nuit et jour pour « garder la boîte » et barrer l'accès aux deux autres
entreprises du site (Top reflex et Offset feuilles du Nord). « On a été très
patient, mais il s'est défilé à chaque rendez-vous. » Sauf à celui d'hier. « Il
voulait nous voir pour nous demander de débloquer », indique Frédéric
Deregnaucourt. Pas vraiment enclins à céder du terrain, les salariés ont
profité de l'occasion pour « retenir » leur ancien patron. Faisant monter d'un
cran la pression.
« Une séquestration illégale et un piquet d'occupation,
c'est inadmissible. Cet homme a 64 ans, il est cardiaque, et il s'est battu
pour sauver l'entreprise de son père. » Selon Marc Messager, avocat de
Jean-Daniel Decoster, la surcapacité de production au niveau européen n'a
laissé aucune chance de survie à l'imprimerie de Sequedin. Les erreurs
supposées de gestion avancées par les salariés ? « Purs fantasmes ! » Les
primes extra-légales réclamées ? « Si les fins poursuivies sont de lui faire
sortir son chéquier à titre personnel, ce n'est pas la bonne manière d'y
arriver. »
Patrick Markey, directeur départemental de la DIRECCTE
(direction régionale du travail), est arrivé sur le site à 17 h, pour jouer
l'apaisement et la médiation. Les 2 h 45 de discussions avec les deux parties
opposées auront été favorables à Jean-Daniel Decoster, libéré peu avant 20 h,
dans un « climat très tendu », selon son avocat. Côté salariés, « aucune
avancée sur les primes extra-légales, alors on maintient le blocage pour
conserver un moyen de pression ».
Une réunion est prévue dans les locaux de la DIRECCTE,
demain après-midi.