samedi 17 décembre 2011

2 membres de la chorale "Hécatombe" relaxés


Ils avaient entonné “Hécatombe” devant la Préfecture de police de Paris, en juin. Michel B. et Jean-Paul L., poursuivis pour violences pendant la dispersion du rassemblent, ont été relaxés ce mardi.

Le 18 juin, une petite bande de gens (entre 20 et 50) chante Hécatombe, la chanson de Georges Brassens, devant la Préfecture de police de Paris. Ils rendent hommage au musicien et affichent leur soutien à un homme condamné à Cherbourg trois semaines plus tôt pour avoir diffusé la chanson à plein tube depuis sa fenêtre, sous laquelle passaient deux policiers. A Toulouse, une trentaine de personnes ont été arrêtées en juin pour l’avoir reprise devant le commissariat. Hécatombe étant chanson écrite par Brassens dans les années 1950, racontant un pugilat entre des femmes de Brive-la-Gaillarde et des gendarmes.

Michel B., 47 ans et les cheveux longs, appartient au groupe Kropotkine de la Fédération anarchiste, il comparaîssait avec son co-interprète Jean-Paul L., 64 ans, devant la 28e chambre du tribunal correctionnel de Paris. Jean-Paul L., lui, avait entendu parler de l’initiative musicale dans l’émission de Daniel Mermet. Les deux hommes au casier vierge sont accusés de violences volontaires contre deux gendarmes (chacun le sien), n’ayant pas entraîné d’arrêt de travail. Ils doivent s’expliquer sur le déroulement du rassemblement.

"Ce n'était pas une manifestation mais une chorale", “Il y avait des microphones ou c’était a capella?” interroge le juge. A capella mon capitaine. Michel B. raconte : “Ça avait l’air de les inquiéter puisqu’il y avait de plus en plus de gardes mobiles autour de nous. Ce n’était pas une manifestation mais une chorale.” Les gendarmes encerclent les troubadours, leur demandent de se disperser puis les repoussent, sur ordre, jusque dans la bouche du métro Cité. Bousculade dans les escaliers ou bagarre comme à Brive-la-Gaillarde, les deux hommes sont élus fauteurs de trouble.





Michel B. explique avoir été déséquilibré dans l’escalier bondé, par les pandores pressés. “N’ayant pas accès à la rampe d’escalier, je me suis accroché à ce que je trouvais, c’est-à-dire l’oreillette du gendarme.” Cinq agents le plaquent au sol et l’embarquent. Le gendarme à l’oreillette pendante, absent à l’audience, le contredit dans son rapport : “Il m’a bousculé, attrapé par le cou et poussé.” Un collègue à lui a vu le prévenu le “plaquer contre le mur”. Sifflements dans la salle, où une vingtaine de personnes, dont les chanteurs (sans croix de bois), ont fait le déplacement.

Dessinateur industriel à la retraite, Jean-Paul L. paraît encore surpris de se retrouver à la barre. Le rapport du gendarme Courtecuisse (absent également) s’abat sur lui : “Il m’a donné un coup au visage, côté gauche, main ouverte, avec l’effet d’une gifle. J’en ai perdu mon calot.” Le prévenu, d’une petite voix, raconte sa version des faits d'une manifestation festive qui fini en eau de boudin.

La procureure décide de “ne pas aller plus loin” vu “la difficulté de distinguer ce qui relève de violences et ce qui relève de bousculade” et “le manque de précision des gendarmes”. Faute de réquisitions, elle lance une pique. Les prévenus “sont bien conscients que ce rassemblement n’était pas innocent. On ne chante pas n’importe quoi n’importe où. Le message était aussi politique que festif”. 

L’avocat Jean-Yves Halimi en fait son miel : “C’est bien le contenu de la chanson de Georges Brassens qui pose problème!”. “Donner un ordre de dispersion suppose un attroupement susceptible de porter atteinte à l’ordre public. Nous avons une chorale, pacifique, qui comporte des gens d’un certain âge (Brassens aurait dit des “têtes chenues”)et des enfants.”. Il montre au juge les clichés du rassemblement, “minute par minute”. “Ici vous voyez le gendarme qui tente de lui arracher l’oreille.” L’avocat dénonce “l’injonction paradoxale” des forces de l’ordre, qui dans le même temps ordonnent au groupe de se disperser et empêchent les individus de quitter les lieux à pied. “L’un comme l’autre se seraient dispersés par voie terrestre si on leur en avait laissé la faculté.” Par voie terrestre ils repartent du tribunal, relaxés au bénéfice du doute.