dimanche 4 mars 2012

Le grand déballage de Gérard Dalongeville


Gérard Dalongeville, ancien maire d'Hénin-Beaumont, poursuivi pour détournements de fonds, vient de sortir un livre que l'on peut qualifier de brûlot : Rose mafia.

L'ancien maire a décidé, quelques mois avant la tenue de son procès, de tout déballer. Il décrit une fédération socialiste du Pas-de-Calais hors des lois où clientélisme, appels d'offres truqués et blanchiment d'argent seraient monnaie courante. « J'accuse la fédération socialiste du Pas-de-Calais d'avoir organisé et utilisé à son profit le détournement de fonds publics, à Hénin-Beaumont et ailleurs. » Gérard Dalongeville fait trembler le Parti socialiste du Pas-de-Calais. Dans son livre, il raconte, en détail, comment, principalement dans le bassin minier, là où il a exercé, les élus socialistes contrôlent tout, « les mairies, les communautés d'agglomérations, les sociétés d'économie mixte, etc. » Et auraient laissé perdurer avec des entreprises privées « un financement occulte en violation des lois de financement des partis ».

S'il est question de l'affaire d'Hénin-Beaumont, pour laquelle Gérard Dalongeville a été mis en examen, l'homme évoque surtout le cas de Liévin et de Jean-Pierre Kucheida, qu'il considère comme le « roi de Liévin » et le grand manitou de la fédération socialiste du Pas-de-Calais.

S'il se défend d'avoir écrit ce livre par vengeance contre ses anciens camarades du parti, les descriptions qu'il en fait sont pleines d'amertume : « Kucheida, un petit bonhomme trapu, on croirait un bûcheron (...) Mellick, un vieux beau façon Nestor Burma, mais avec un regard tordu. (...) » Daniel Percheron en prend aussi plein la pipe, un homme que Dalongeville compare à « un grand sage », « difficile à cerner » et qui « est à la limite de la fourberie ». C'est contre ce trio d'élus que celui qui explique avoir débuté dans la vie politique à la demande de Percheron s'en prend.

Un système « pourri jusqu'à la moelle » Dans son livre, Dalongeville décrit un système que l'on croyait révolu depuis le milieu des années 1990. Il raconte les rouages d'un système qui l'a servi en son temps et qui l'aurait conduit à effectuer huit mois de prison préventive. Un système « pourri jusqu'à la moelle ».

L'Héninois, qui tente de se repentir, attaque de front l'omniprésence de Kucheida et décrit le système de ce dernier où le pilier serait « la confusion entre l'intérêt personnel et l'intérêt général. » Dalongeville n'y va pas avec le dos de la cuillère. Il décrit, donne des exemples, distille les relations et conclut. Selon lui, ce système « s'apparente au centralisme soviétique : tout est décidé par un seul homme et pour un seul homme ». L'omniprésent Kucheida est vu comme un chef d'orchestre. Le ponte liévinois serait au coeur d'un fonctionnement où se mêle copinage, intérêts financiers, clientélisme... La Soginorpa ? « La vache à lait du PS », « le tiroir caisse de JPK, une machine à marchés lucratifs pour les entreprises du bâtiment » et « un distributeur à emplois fictifs pour récompenser les copains et s'assurer de leur silence (... ) ».

Clientélisme, marchés publics truqués... Dalongeville s'attarde sur le fonctionnement de Kucheida pour museler les gens, assure que ce dernier tirerait « les ficelles du PS du Pas-de-Calais » et attribuerait des logements dans l'optique de soigner son réseau d'électeurs... La société d'économie mixte Adévia, qui gère notamment l'aménagement du Louvre-Lens, serait aussi au coeur des « magouilles » socialistes. Et Dalongeville prend le temps de dénouer les raisons, de balancer des exemples, de citer des noms... L'homme parle de consanguinité entre Adévia et Epinorpa. L'élu, qui semble vouloir faire croire à « un nouveau départ », tacle ses anciens amis un à un. « J'ai menti pour protéger (mon parti), j'ai subi l'enfermement, l'emprisonnement, pour sauver un système. Et un jour j'ai dit : "ça suffit". » D'entrée, Gérard Dalongeville affirme qu'il ne pouvait plus « continuer à se taire », rappelle « avoir payé pour (ses) erreurs mais aussi pour d'autres ». Il met le doigt sur la corruption, n'épargne pas le réseau franc-maçon et démonte la génération de socialistes « arrivée au pouvoir dans les années 1970, emmenée par Daniel Percheron, Jacques Mellick, Albert Facon et Jean-Pierre Kucheida, qui a construit autour des mines de charbon, son système féodal ». Après avoir digéré 298 pages, une chose est sûre : les pontes du PS ont en bel et bien pris plein leur grade.

Avec Rose mafia, l'ancien élu héninois dévoile les coulisses pas si roses du parti et semble laver son linge sale sur la place publique. Histoire de ne pas tomber seul ?



source : L'Avenir De L'Artois