Le tribunal administratif de Rouen a condamné jeudi l'État à
indemniser 77 détenus pour des conditions d'incarcération "n'assurant pas
le respect de la dignité inhérente à la personne humaine". Depuis 2008,
plusieurs condamnations de ce type ont déjà été prononcées, mais les conditions
de détention des détenus ne changent pas pour autant.
"Le seul moyen de faire plier l'Etat c'est de toucher
au porte-feuille". Une nouvelle fois, Maître Etienne Noël vient de faire
condamner l'Etat à payer des dommages et intérêts à 77 détenus de la maison
d'arrêt de Rouen. Le tribunal administratif de la ville a reconnu que les
conditions d'incarcération n'assuraient "pas le respect de la dignité
inhérente à la personne humaine".
Ces 77 dossiers appartenaient à un ensemble de 99, dont une
vingtaine ont été rejeté parce que les détenus n'avaient pas versé la somme de
35 euros nécessaire pour entamer la procédure. "Devoir payer pour saisir
une juridiction, c'est scandaleux", s'exclame Etienne Noël.
Et l'avocat n'en est pas à sa première affaire. Son premier
dossier de ce type date de 1997. Onze ans plus tard, il obtenait sa première
condamnation. Depuis, il a gagné près de 300.000 euros pour 164 détenus de la
maison d'arrêt de Rouen.
Mais pour autant, les conditions de vie au sein de la prison
n'ont pas changé. "On paie les dommages et intérêts et puis il n'y a pas
vraiment de prise en compte", constate Etienne Noël, qui a été élu en juin
secrétaire national de l'Observatoire international des prisons (OIP). Il
espère donc que la multiplication des condamnations fasse bouger les choses.
Ouverte en 1864, la maison d'arrêt de Rouen accueille, selon
les périodes, de 700 à 850 détenus. Le ministère de la Justice a programmé sa
fermeture et recherche depuis plusieurs mois un terrain pour construire un
nouvel établissement.