En Syrie, depuis quelques semaines, les médecins opérant
dans les hôpitaux de fortune soupçonnent l’armée régulière d’utiliser des armes
chimiques contre la population. Le médecin Mohamed Al Mahmed, dont l’engagement
auprès des blessés de Bab Amro a été médiatisé, a enregistré début avril une
vidéo passée assez inaperçue.
Au chevet d’un malade soigné clandestinement, il décrit les
symptômes dont souffrent certains malades originaires de ce quartier assiégé
puis attaqué par l’armée fidèle au régime : « Ceci est l’un des cas que nous
avons pu recenser chez les gens originaires de Bab Amro. Ils sont victimes de
malaises, ont des réactions cutanées, des douleurs aux articulations et aux
muscles, des pertes de mémoire ainsi qu’une perte des cheveux. »
Vidéo du docteur en médecine Mohamed Al Mahmed
Sur la vidéo mise en ligne le 4 avril sur YouTube, le jeune
médecin ajoute : « Nous avons constaté tous ces troubles à plusieurs reprises
depuis quatre jours à Bab Amro, cela prouve que le régime utilise des armes
chimiques contre les habitants. Ce cas présent est l’un des douze déjà
recensés. Deux qui ont succombé à leurs blessures à l’hopital d’Al-Bor ! » La
caméra zoome sur la tête du malade, dépourvue à certains endroits de cheveux.
Il attrape la tignasse de l’homme, les cheveux se détachent sans difficulté.
Mohamed Al Mahmed continue d’enregistrer son message : «
Nous faisons appel aux organisations humanitaires afin d’effectuer les analyses
médicales qui nous permettraient de soigner les cas constatés. En effet, il n’y
a pas de laboratoire sur place permettant d’établir des diagnostics. D’autres
cas ont aussi été répertoriés à Al-Rastan, dans la banlieue de Homs, aux
alentours du 10 avril.
Lui-même médecin, Mustapha Hijazi appelle tout de même à la
prudence : « Il y a eu beaucoup de rumeurs et les personnes ne sont pas
touchées par dizaines. Or, en général, les attaques à l’arme chimique ou aux
produits toxiques touchent un grand nombre de personne à la fois. »
Interview d'un médecin syrien
Ce qui est sûr, souligne-t-il, est que les docteurs disent
découvrir des symptômes auxquels ils n’avaient pas été confrontés depuis le
début de la révolution syrienne. Ceux qui ont fait le choix de porter secours à
la population dans les hôpitaux de fortune n’ont pas les moyens d’établir des
diagnostics sérieux pour ces nouveaux cas : « Il s’agit en général de médecins
très jeunes, souvent internes, qui n’ont pas beaucoup d’expérience. Ils ne
disposent pas non plus du matériel nécessaire pour savoir de quoi ces malades
sont atteints. »
Début février, l’organisation Médecin sans frontières
dénonçait le fait que le régime syrien prenne pour cible tout hôpital
clandestin et les médecins qui y travaillent. Filmé de dos (voir ci-dessus),
l’un d’eux expliquait que « la sécurité est ce qui préoccupe le plus les
médecins syriens » puisque « la possibilité d’être arrêté est grande ».