Les affaires éclaboussant la police du Nord s'enchaînent L'IGPN,
la police des polices, débarque en début de semaine à Lille après deux plaintes
déposées par des fonctionnaires.
Harcèlement moral permanent, discrimination, homophobie. Ces
accusations sont portées par Philippe Patisson, chef du CCPD (centre de
coopération policière et douanière) de Tournai (B) depuis juin. Elles visent
son passage tourmenté à la tête du SDIG (service départemental de l'information
générale) du Nord de 2008 à 2011 : « J'ai signalé ces faits à la direction
centrale, personne n'a bougé, déplore le commissaire divisionnaire. Pour me
protéger ainsi que mes collaborateurs, j'ai attiré l'attention de la justice :
une décision mûrie et douloureuse après trente ans dans la fonction publique. »
Il a déposé plainte contre X au parquet de Lille en février.
Plusieurs policiers sont visés à différents degrés, dont
Jean-Claude Menault, numéro 1 de la sécurité publique du Nord à l'époque. «
C'est le résultat de tensions au sein de l'information générale avec une guerre
interne entre pro et anti Patisson, analyse Benoît Lecomte, secrétaire zonal du
syndicat Alliance. Il a vécu des moments difficiles. Tout a été fait pour le
déstabiliser et l'inciter à quitter ses fonctions. Certains n'ont pas hésité à
le railler et le provoquer sur ses orientations sexuelles. » La lutte des clans
aurait débouché sur des dérapages : « Des propos racistes, xénophobes et
homophobes ont été tenus, à l'antithèse de mon engagement policier, martèle
Philippe Patisson. Mais ça ne concerne qu'une minorité de fonctionnaires. Par
ailleurs, dès le départ, il y a eu une volonté de casser le SDIG (nouvelle
version des RG créée en 2008) de la part de Jean-Claude Menault. Notre travail
n'a jamais suscité son intérêt. »L'ex-chef du SDIG met aussi en cause une
enquête menée contre lui : des pressions auraient été exercées par des
officiers et un commissaire sur son garagiste personnel afin d'obtenir une fausse
attestation visant à le salir.
Des témoignages de
fonctionnaires alimentent la plainte. L'un d'eux émane de Serge Guillen,
l'ancien grand patron national de l'information générale. La police des polices
l'a entendu après l'audition de Philippe Patisson fin mars à Paris. Elle arrive
en début de semaine à l'hôtel de police de Lille Sud.
Plusieurs dizaines de
personnes devraient être interrogées. L'IGPN tentera peut-être d'élucider une
autre plainte déposée récemment par une fonctionnaire du SDIG. Là encore, du
harcèlement est évoqué, tout comme des injures racistes.
Jean-Claude Menault
assure n'avoir appris l'existence des plaintes que « vendredi, par une
journaliste. Curieusement, elles ont été déposées après mon départ en retraite
au 1er février (à cause du scandale du Carlton de Lille). » Arguant de son
ignorance de leur contenu, il ne les commente pas en détail. Mais tacle Philippe
Patisson en sous-entendus : « Il y en a qui confondent harcèlement et commandement.
En général, ce ne sont pas les meilleurs. On est amenés à leur faire des
remarques, c'est le boulot d'un chef. »
Selon Philippe Patisson, sa situation l'a conduit à réclamer
sa mutation du Nord, raison de son arrivée à Tournai. « Depuis que je suis
parti, il y a eu au SDIG cinq arrêts pour dépression et douze demandes de
mutation. » L'expression d'un malaise.