Le président russe, Vladimir Poutine, a annoncé, vendredi 8
juin, avoir promulgué une loi instaurant des amendes considérables pour punir
les organisateurs d'actions de protestation ou leurs participants en cas de
troubles. "Non seulement j'ai signé la loi, mais j'ai étudié le dossier
envoyé par la Douma" (Chambre basse du Parlement russe), qui estime que ce
texte est comparable à ceux de la législation européenne, a déclaré M. Poutine.
"En comparant cette loi avec la législation dans d'autres pays européens -
l'Allemagne, l'Italie, l'Espagne, la Grande-Bretagne, la France - notre loi n'a
pas de dispositions qui seraient plus dures que celles prévues par des lois
similaires dans les pays mentionnés", a-t-il ajouté.
Les amendes prévues en cas de rassemblement non autorisé ou
en cas de trouble à l'ordre public lors de manifestations ayant reçu l'aval des
autorités peuvent aller jusqu'à 300 000 roubles (7 300 euros) pour les
personnes physiques contre 5 000 roubles (125 euros) actuellement. Pour les
personnes morales - les organisations politiques par exemple - l'amende peut
atteindre 1 million de roubles (plus de 25 000 euros). La loi entrera en
vigueur dès sa publication samedi dans le journal officiel Rossiiskaïa Gazeta,
a souligné le porte-parole de M. Poutine, Dmitri Peskov.
Un rapport d'experts du Conseil consultatif pour les droits
de l'homme auprès du Kremlin a jugé jeudi que cette loi violait l'article 31 de
la Constitution, qui garantit la liberté de rassemblement. Il a par ailleurs
estimé que les amendes instaurées sont "démesurées par rapport aux
conditions matérielles de la majorité des citoyens". Enfin, il relève que
la loi est trop vague pour garantir les droits des citoyens étant donné que le
texte ne précise pas ce qui peut être considéré comme une "infraction à
l'ordre public" pendant une manifestation.
La victoire avec près de 50 % des suffrages de Russie unie
aux législatives de décembre, obtenue selon l'opposition et des observateurs au
prix de fraudes massives, a déclenché une vague sans précédent de contestation
ces derniers mois contre le pouvoir de M. Poutine.
L'Union européenne s'est inquiétée jeudi des "possibles
implications de cette loi" en soulignant que "des réglementations qui
découragent l'engagement civique n'aident pas à atteindre l'objectif" d'un
"dialogue constructif" entre l'Etat et la société civile.
L'ex-président soviétique et père de la perestroïka, Mikhaïl Gorbatchev, a
qualifié la promulgation de la loi d'"erreur". "C'est une erreur
et il faudrait la corriger", a-t-il déclaré à l'agence Interfax.
Pour le chef du parti d'opposition Iabloko, Sergueï
Mitrokhine, l'entrée en vigueur du texte équivaut à "une interdiction des
rassemblements politiques". "Maintenant n'importe qui peut être puni
en se voyant infliger un travail d'esclave et une amende folle. Je ne peux pas
appeler les gens à manifester en sachant qu'ils risquent la prison",
a-t-il ajouté.
L'un des leaders de l'opposition, Boris Nemtsov, a pour sa
part promis d'aller jusqu'à la Cour de Strasbourg pour contester cette nouvelle
loi "anticonstitutionnelle, qui va à l'encontre de la Convention
européenne des droits de l'homme".
La loi entrera en vigueur à quelques jours d'un nouveau
rassemblement de l'opposition prévu le 12 juin à l'occasion d'une fête
nationale. La mairie de Moscou a autorisé vendredi une marche à laquelle les
organisateurs attendent 50 000 personnes et qui débutera à 8 heures GMT place
Pouchkine, en plein centre de Moscou, pour finir avenue Sakharov où plusieurs
dizaines de milliers de personnes avaient manifesté en décembre contre les
fraudes électorales. Entre cela et son soutiens a la Syrie, la Russie est
vraiment un exemple de liberté non ?????