mardi 15 mai 2012

Des militantes égyptiennes accusent de nouveau les militaires de sévices sexuels


Des militantes et des groupes de défense des droits de la personne ont accusé l’armée égyptienne et les autorités carcérales d’avoir commis des agressions sexuelles contre des femmes arrêtées lors de la dernière rafle contre les manifestants au Caire.

Ces accusations, qui rappellent des incidents semblables survenus lors de précédentes manifestations, ajoutent de nouvelles tensions dans la campagne électorale en Égypte, deux semaines avant l’élection présidentielle.

Plus d’une douzaine de femmes faisaient partie des quelque 300 manifestants arrêtés le week-end dernier dans la foulée d’une manifestation devant le ministère de la Défense qui a dégénéré.

La militante Aida Seif al-Dawla a déclaré que des gardiennes de prison avaient agressé sexuellement certaines militantes détenues en inspectant leurs organes génitaux sous prétexte de rechercher des drogues.

«C’est une agression sexuelle», a dénoncé la militante. «Les femmes sont blessées, physiquement et psychologiquement.»

L’une des femmes en question, Aya Kamal, a témoigné mardi devant la commission des droits de la personne du Parlement au sujet des sévices dont elle dit avoir été victime lors de son arrestation.

Lors d’un témoignage télévisé, Aya Kamal a déclaré à la commission qu’elle s’était réfugiée dans une mosquée pour échapper aux soldats qui tentaient de disperser les manifestants.

Elle a raconté que des soldats avaient pris la mosquée d’assaut et s’étaient relayés pour l’insulter, lui cracher dessus et lui faire des attouchements sexuels. D’autres femmes étaient présentes et ont été victimes des mêmes sévices, a-t-elle dit. Des manifestants de sexe masculin ont aussi été battus et menacés d’agression sexuelle, a déclaré Aya Kamal.

Elle a affirmé qu’un soldat l’avait frappée à la tête avec un bâton et qu’elle avait perdu connaissance pendant quelques secondes. Pendant ce temps, un autre soldat a tenté de lui enlever son voile islamique.

À leur arrivée dans un centre de détention militaire, des soldats ont célébré l’arrivée de nouveaux détenus.

«Ils nous ont insultées, nous les femmes. Ils ont ouvert les fenêtres (de la camionnette) et ont tenté de toucher notre corps et de nous harceler. Ils nous ont menacées d’agression sexuelle et nous ont dit que si l’une d’entre nous ouvrait la bouche, elle serait jetée en pâture aux soldats à l’intérieur en sachant ce qui lui arriverait», a raconté Mme Kamal en retenant ses larmes.

Aida Seif al-Dawla a expliqué que la plupart des femmes victimes de sévices des militaires n’étaient pas prêtes à les dénoncer en public à cause du stigmate social associé aux questions à caractère sexuel dans une société musulmane conservatrice, et aussi parce que ces femmes craignent d’être convoquées pour être interrogées.

Un responsable militaire a indiqué qu’il n’y avait pas eu de plainte formelle au sujet des agressions alléguées. Il a cependant indiqué qu’Aya Kamal faisait toujours l’objet d’une enquête, ce qui signifie qu’elle pourrait encore être accusée d’avoir attaqué des militaires et d’avoir perturbé l’ordre public.

Ce responsable a réclamé l’anonymat conformément aux règles de l’armée.

Les militants pro-démocratie accusent les militaires d’avoir recours aux mêmes pratiques abusives en vigueur sous le régime d’Hosni Moubarak. L’an dernier, les «tests de virginité» menés par des médecins militaires sur des manifestantes détenues a causé un tollé en Égypte et ailleurs dans le monde.

L’armée avait alors admis qu’il y avait bel et bien eu de tels tests, tout en affirmant que les commandants militaires ne les avaient pas autorisés. Un médecin militaire traduit en justice pour avoir pratiqué ces tests a été acquitté. Un tribunal civil a demandé à l’armée de cesser cette pratique.

Les militants estiment que les tests de virginité et les agressions sexuelles visent à intimider les femmes et à les maintenir à l’écart des manifestations.