Des militantes et des groupes de défense des droits de la
personne ont accusé l’armée égyptienne et les autorités carcérales d’avoir
commis des agressions sexuelles contre des femmes arrêtées lors de la dernière
rafle contre les manifestants au Caire.
Ces accusations, qui rappellent des incidents semblables
survenus lors de précédentes manifestations, ajoutent de nouvelles tensions
dans la campagne électorale en Égypte, deux semaines avant l’élection
présidentielle.
Plus d’une douzaine de femmes faisaient partie des quelque
300 manifestants arrêtés le week-end dernier dans la foulée d’une manifestation
devant le ministère de la Défense qui a dégénéré.
La militante Aida Seif al-Dawla a déclaré que des gardiennes
de prison avaient agressé sexuellement certaines militantes détenues en
inspectant leurs organes génitaux sous prétexte de rechercher des drogues.
«C’est une agression sexuelle», a dénoncé la militante. «Les
femmes sont blessées, physiquement et psychologiquement.»
L’une des femmes en question, Aya Kamal, a témoigné mardi
devant la commission des droits de la personne du Parlement au sujet des
sévices dont elle dit avoir été victime lors de son arrestation.
Lors d’un témoignage télévisé, Aya Kamal a déclaré à la commission
qu’elle s’était réfugiée dans une mosquée pour échapper aux soldats qui
tentaient de disperser les manifestants.
Elle a raconté que des soldats avaient pris la mosquée
d’assaut et s’étaient relayés pour l’insulter, lui cracher dessus et lui faire des
attouchements sexuels. D’autres femmes étaient présentes et ont été victimes
des mêmes sévices, a-t-elle dit. Des manifestants de sexe masculin ont aussi
été battus et menacés d’agression sexuelle, a déclaré Aya Kamal.
Elle a affirmé qu’un soldat l’avait frappée à la tête avec
un bâton et qu’elle avait perdu connaissance pendant quelques secondes. Pendant
ce temps, un autre soldat a tenté de lui enlever son voile islamique.
À leur arrivée dans un centre de détention militaire, des
soldats ont célébré l’arrivée de nouveaux détenus.
«Ils nous ont insultées, nous les femmes. Ils ont ouvert les
fenêtres (de la camionnette) et ont tenté de toucher notre corps et de nous
harceler. Ils nous ont menacées d’agression sexuelle et nous ont dit que si
l’une d’entre nous ouvrait la bouche, elle serait jetée en pâture aux soldats à
l’intérieur en sachant ce qui lui arriverait», a raconté Mme Kamal en retenant
ses larmes.
Aida Seif al-Dawla a expliqué que la plupart des femmes
victimes de sévices des militaires n’étaient pas prêtes à les dénoncer en
public à cause du stigmate social associé aux questions à caractère sexuel dans
une société musulmane conservatrice, et aussi parce que ces femmes craignent
d’être convoquées pour être interrogées.
Un responsable militaire a indiqué qu’il n’y avait pas eu de
plainte formelle au sujet des agressions alléguées. Il a cependant indiqué
qu’Aya Kamal faisait toujours l’objet d’une enquête, ce qui signifie qu’elle
pourrait encore être accusée d’avoir attaqué des militaires et d’avoir perturbé
l’ordre public.
Ce responsable a réclamé l’anonymat conformément aux règles
de l’armée.
Les militants pro-démocratie accusent les militaires d’avoir
recours aux mêmes pratiques abusives en vigueur sous le régime d’Hosni
Moubarak. L’an dernier, les «tests de virginité» menés par des médecins
militaires sur des manifestantes détenues a causé un tollé en Égypte et
ailleurs dans le monde.
L’armée avait alors admis qu’il y avait bel et bien eu de
tels tests, tout en affirmant que les commandants militaires ne les avaient pas
autorisés. Un médecin militaire traduit en justice pour avoir pratiqué ces
tests a été acquitté. Un tribunal civil a demandé à l’armée de cesser cette
pratique.
Les militants estiment que les tests de virginité et les
agressions sexuelles visent à intimider les femmes et à les maintenir à l’écart
des manifestations.